Page:Mallarmé - Divagations.djvu/131

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être qui le premier reçut des dieux la voix et dit l’ode éblouie avant notre aïeul Orphée. Institue, ô mon songe, la cérémonie d’un triomphe à évoquer aux heures de splendeur et de féerie, et l’appelle la Fête du Poëte : l’élu est cet homme au nom prédestiné, harmonieux comme un poème et charmant comme un décor. Dans l’empyrée, il siège sur un trône d’ivoire, ceint de la pourpre que lui a le droit de porter, le front ombragé des géantes feuilles du laurier de la Turbie. J’ouïs des strophes ; la Muse, vêtue du sourire qui sort d’un jeune torse, lui verse l’inspiration — cependant qu’à ses pieds meurt une nue reconnaissante. La grande lyre s’extasie dans ses mains. »

Le pauvre trumeau, suranné ; et pardon.

Je recueille quelque fierté, reflet concédé par le prince de lettres à l’admirateur vrai, qu’un sentiment, après un quart de siècle, se reconnaisse, pareil mais affiné dans un sens très aigu, que je vais m’appliquer à définir, peut-être, subtilement.

La Poésie, ou ce que les siècles commandent tel, tient au sol, avec foi, à la poudre que tout demeure; ainsi que de hautes fondations, dont l’ombre sérieuse augmente le soubassement, le confond et l’attache. Ce cri de pierre s’unifie vers le ciel en les piliers interrompus, des arceaux ayant un