Page:Mallarmé - Divagations.djvu/179

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ple les personnages en contemporains du dramaturge : Hamlet, lui, évite ce tort, dans sa traditionnelle presque nudité sombre un peu à la Goya. L’œuvre de Shakespeare est si bien façonnée selon le seul théâtre de notre esprit, prototype du reste, qu’elle s’accommode de la mise en scène de maintenant, ou s’en passe, avec indifférence. Autre chose me déconcerte que de menus détails infiniment malaisés à régler et discutables : un mode d’intelligence particulier au lieu parisien même où s’installe Elseneur et, comme dirait la langue philosophique, l’erreur du Théâtre-Français. Ce fléau est impersonnel et la troupe d’élite acclamée, dans la circonstance, multiplia son minutieux zèle : jouer Shakespeare, ils le veulent bien, et ils veulent le bien jouer, certes. À quoi le talent ne suffit pas, mais le cède devant certaines habitudes invétérées de comprendre. Ici Horatio, non que je le vise, avec quelque chose de classique et d’après Molière dans l’allure : mais Laertes, j’aborde au sujet, joue au premier plan et pour son compte comme si voyages, double deuil pitoyable, comportaient un intérêt spécial. Les plus belles qualités (au complet,) qu’importe dans une histoire éteignant tout ce qui n’est un imaginaire héros, à demi mêlé à de l’abstraction ; et c’est trouer de sa réalité, ainsi qu’une vaporeuse toile, l’ambiance, que dégage l’emblématique Hamlet. Comparses, il le faut ! car dans l’idéale peinture de la scène tout se meut selon une réciprocité symbo-