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Page:Mallarmé - Les Dieux antiques.djvu/327

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Pervers, ils méditaient, dans leur songe envieux,
D’entraver à jamais l’éclosion des dieux ;
Mais nul ne peut briser ta chaîne, ô destinée !
Et la Vache céleste en ce temps était née !
Blanche comme la neige, où, tiède, ruisselait
De ses pis maternels la source de son lait,
Elle trouva le roi des Ases, frais et rose,
Qui dormait, fleur divine aux vents du pôle éclose.
Baigné d’un souffle doux et chaud, il s’éveilla ;
L’aurore primitive en son œil bleu brilla,
Il rit, et, soulevant ses lèvres altérées,
But la vie immortelle aux mamelles sacrées !
Voici qu’il engendra les Ases bienheureux,
Les purificateurs du chaos ténébreux,
Beaux et pleins de vigueur, intelligents et justes.
Ymer, dompté, mourut entre leurs mains augustes ;
Et de son crâne immense ils formèrent les cieux,
Les astres, des éclairs échappés de ses yeux,
Les rochers, de ses os. Ses épaules charnues
Furent la terre stable, et la houle des nues
Sortit en tourbillons de son cerveau pesant.
Et, comme l’univers roulait des flots de sang,
Faisant jaillir, du fond de ses cavités noires,
Une écume de pourpre au fond des promontoires,
Le déluge envahit l’étendue, et la mer
Assiegéa le troupeau hurlant des fils d’Ymer,
Ils fuyaient, secouant leurs chevelures rudes,
Escaladant les pics des hautes solitudes,
Monstrueux, éperdus ; mais le sang paternel
Croissait, gonflait ses flots fumants jusques au ciel ;
Et voici qu’arrachés des suprêmes rivages,
Ils s’engloutirent tous avec des cris sauvages.
Puis, ce rouge océan s’enveloppa d’azur ;
La terre d’un seul bond reverdit dans l’air pur ;
Le couple hummn sortit de Vécorce du frên^
Et le soleil dora l’immensité sereine.
Hélas ! mes sœurs, ce fut un rêve éblouissant !
Voyez ! la neige tombe et va s’épaississant !
Et peut-être Yggdrasill, le frêne aux trois racines,
Ne fait-il plus tourner les neuf sphères divines !
Je suis la vieille Urda, l’éternel Souvenir ;
Mais le présent m’échappe autant que l’avenir,

Leconte de Lisle
(Poëmes Barbares.)


MYTHOLOGIE CLASSIQUE

L’OLYMPE
Le Satire

. . . . . . . . . . . . . . . . . .
Quoique à peine fût-il au seuil de la caverne
De rayons et d’éclairs que Jupiter gouverne,
Il contemplait l’azur, des pléiades voisin ;