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LA FRANCE DÉCLARE LA GUERRE À L’ANGLETERRE

France ; au mois de mars 1744 elle déclara formellement la guerre à l’Angleterre.

Cet événement était donc prévu depuis longtemps et la rupture de la paix n’avait été qu’une question de temps. On a vu comment Dupleix s’était préparé à répondre aux hostilités qu’il prévoyait. Il nous reste maintenant à le considérer sous un autre aspect et à faire connaître l’infatigable ardeur qu’il déploya pour préserver complètement Pondichéry.

Quand les Directeurs de la Compagnie des Indes annoncèrent à leur Gouverneur général de Pondichéry que la guerre avec l’Angleterre était inévitable, ils lui apprirent en même temps que M. de La Bourdonnais avait reçu l’ordre de se porter à son secours avec son escadre ; ils insistaient pour qu’il fît tous ses efforts afin d’arriver à un traité de neutralité avec le Gouverneur de l’établissement anglais, et pour convenir avec lui que le commerce des deux nations avec l’Inde se continuerait sans entraves de part ni d’autre. Ces instructions trouvèrent Dupleix tout disposé à s’y conformer quoiqu’il eût peu d’espoir de réussir dans ses négociations. Il n’avait aucune connaissance positive des mouvements de La Bourdonnais ; même avant la déclaration de guerre, les croiseurs anglais s’étaient répandus dans les mers de l’Inde et se tenaient tout prêts à ruiner le commerce français[1]. Cependant, soit par des bâtiments égarés, soit par toute autre voie, l’avis lui était parvenu qu’une flotte aux ordres du commodore Barnet avait pris la mer avec la mission spéciale de détruire de fond en comble l’Établissement français.

Il fit néanmoins la tentative ordonnée et poussa ses instances presque jusqu’aux supplications. Mais M. Morse, le Gouverneur de Madras et son Conseil avaient pour désirer la guerre précisément les mêmes motifs qui faisaient rechercher la paix par Dupleix. L’escadre de Barnet était, ils le savaient bien, dans les mers orientales, occupée à intercepter les bâtiments français naviguant entre la Chine et l’Europe ; elle était prochainement attendue à Madras avec ses

  1. Depuis Le Noir le commerce français avait fait de grands progrès : en 1740, la Compagnie possédait quarante grands vaisseaux équipés pour le commerce de l’Inde où il s’en expédiait dix ou douze par an.