Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/218

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exprès pour me trouver à votre rencontre. Dans le bouquet que vous emporterez ce soir, cueillez des œillets pour votre mère, et dites-lui qu’ils représentent mon amitié. »

N’y a-t-il pas, avec de la sensibilité et de l’émotion, une sorte de tendresse dans son remerciement à l’envoi des Essais poétiques ? « Je vous remercie du gracieux présent que vous m’avez fait. J’aurais pu dire, au moment même où l’on m’a remis vos vers, tout ce que j’en pense ; il y avait plusieurs jours que je les possédais, et je les relisais avec enchantement dans une retraite où le prestige du monde et la complaisance des admirations disparaît. Je n’ose mêler plus de louanges sincères aux flatteries qui sans doute vous environnent ; je ne veux pas donner à la voix d’une vieille amitié le tort de paraître froide, au milieu des compliments et des gazettes, mais j’ai regretté dans mes bois de ne pouvoir vous adresser à vous-même l’hommage du plaisir que m’a fait votre livre ; car si j’ai vu se refroidir quelques empressements littéraires pour n’avoir pu me faire l’adulateur du succès, ou plutôt d’ouvrages qui ne contentaient mon mauvais goût poétiquement ni philosophiquement, je sens que l’hypocrisie que je ne puis m’imposer n’eût point fait baisser mes yeux devant votre couronne. Votre envoi m’a fait naître dans l’esprit (peut-être mieux que dans l’esprit) deux sentiments qu’il faut que je vous dise. J’ai été charmé de supposer qu’on pouvait, autour de vous, oublier à demi les torts qu’on aurait eus soi-même ; et cette dédicace à Gustave [O’Donnell, récemment enlevé par le croup] a tou-