Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/260

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au physique dans son uniforme de lieutenant de la garde royale, il affirme au moral sa maîtrise poé tique, autre genre de séduction. Il est « le plus aimable de tous ». Il coquette avec la jeune Muse. Elle se laisse prendre au jeu. Le Bonheur d’être belle, que son père traitait de boutade, traduit en réalité un ardent cri de joie poussé à l’idée qu’elle est aimée : « Quel bonheur d’être belle alors qu’on est aimée ! » Et plus loin :

Bientôt il va venir ! Bientôt il va me voir !
Comme, en me regardant, il sera beau ce soir !
Le voilà ! Je l’entends, c’est sa voix amoureuse !
Quel bonheur d’être belle ! Oh ! Que je suis heureuse !

Un peu plus tard, l’aveu éclate dans une autre poésie :

Volez, ange de poésie,
Déployez vos ailes de feu ;
Au guerrier qui m’avait choisie
Allez porter un doux aveu.
Allez, et secondez vous-même
L’ardeur dont il est enflammé :
Ne lui dites pas que je l’aime,
Mais faites qu’il se sente aimé !

Elle émaille ses poésies de maintes allusions semblables. Sa mère ne s’y trompe pas, non plus qu’à certaines rougeurs subites. Dans une lettre à Marce line Desbordes-Valmore, elle explique que le refus de plusieurs partis avantageux achève de l’éclairer. Elle obtient l’aveu de Delphine. Dans le tableau que fit Mme Ancelot de son salon en 1824, elle prit soin de placer Vigny exactement derrière Delphine qui se retourne légèrement de son côté, tandis que Parseval de Grandmaison débite à son habitude