Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/28

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mais elle articulait : « Monsieur de Lamartine ».

« Monsieur de Lamartine » était charmant, distingué, grand seigneur, et d’une politesse raffinée. Lorsqu’il lui fut présenté, il lui tourna galamment un compliment dont les termes lui demeuraient présents à la mémoire. Elle les répétait avec complaisance. Je regrette de n’avoir pas noté cette phrase assez banale, mais à chaque mot de laquelle l’intéressée attribuait la plénitude de sa signification et de sa portée. Elle savait ses vers par cœur. Sur un exemplaire des Méditations dont il lui fit hommage, le poète, de son écriture aristocratique, inscrivit une strophe. Elle conservait pieusement ce petit livre.

Elle me parlait encore de Berlioz à l’ironie mordante, à la dent dure ; de Rossini, dont elle raffolait et chantait la musique avec passion ; de Wagner, qu’elle abominait en tant qu’Allemand et dont elle détestait la musique. Je me rappelle sa fureur, un jour qu’une de ses élèves lui chanta la romance de l’Étoile sans en nommer l’auteur. Mme  Labarre se récria d’admiration, mais entra dans une violente colère en apprenant qu’il s’agissait d’un fragment du Tannhäuser.

Elle me nommait Mme  Pasta, Rachel ; elle riait

encore au souvenir d’Arnal. Mon imagination s’exal tait à ces entretiens sur un passé dont je subissais l’émerveillement. Sans doute, ma vieille amie éprouvait un plaisir mélancolique à revenir sur cette période brillante de son existence ; elle s’attardait volontiers à nos causeries. Ma verve poétique s’en inspira. J’écrivis un sonnet, ou quelque chose