Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/290

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

faire jouer. Mme Récamier sait quel regret il en éprouve. Elle lui ménage une revanche. Elle convoque une soixantaine de personnes, une élite, devant qui l’acteur Lafon lira la pièce.

Huit heures du soir. Les rameaux de la Fête-Dieu jonchent encore les cours et les escaliers du couvent de l’Abbaye-aux-Bois. Le dais d’un reposoir, velours rouge et étoiles d’or, demeure debout. Arrivent d’amples et élégantes robes d’organdi, de nobles pairs en habit bourgeois, de jeunes doctrinaires empesés, des muscadins de l’an III restés étourdis. Ce sont Mmes Apponyi et de Fontanes, Sophie et Delphine Gay, les ducs de Doudeauville et de Broglie, MM. de Sainte-Aulaire et de Barante, Ballanche, Cousin, Villemain, Lebrun, Gérard, Lamartine, H. de Latouche, Saint-Marc-Girardin, Valery, Mérimée, David d’Angers, Gudin, le baron Pasquier, de Rémusat, Dubois directeur du Globe, de Girardin, Ampère, Jussieu, Dugas-Montbel, Taylor, Méchin, Mmes  de Boigne, de Gramont, Mme  et Mlle  de Barante, Mlle  de Sainte-Aulaire, etc. « Les intérêts de la cour, les arts, la liberté, la littérature sont représentés par ambassadeurs. »

Nous connaissons déjà le cadre : ce soir, Madame de Staël et la Corinne de Gérard semblent « plus belles au magique éclat des flambeaux » ; deux lauriers à fleurs roses ornent la cheminée de marbre blanc, et un buste qui veut être la Béatrice du Dante, mais que Canova a copié « ici sur nature, dans l’impuissance d’inventer des traits plus par faits ». Le guéridon est prêt, avec la lampe voilée, et le manuscrit fermé qui attend.