Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/293

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propre, la vraie forme de son tempérament d’écrivain, percent dans sa correspondance.

Le comte Alexis de Saint-Priest, rencontré chez Mme de Chastenay, a écrit une comédie qu’il ne parvient pas à faire jouer ; la censure se jette à la traverse. Il communique son manuscrit à Delphine, qui le lui rend avec cette lettre (1" septembre 1829) : « À force de changer de ministre, peut-être en trouverez-vous un qui permette de jouer votre pièce. En attendant, je vous engage à en composer une autre, à la mode, avec beaucoup de rime et fort peu de raison ; cherchez quelque imagination dans le genre du nouveau drame de M. Dumas : c’est une femme qui, pour l’empêcher d’être jaloux du roi, avec lequel elle se promène en bateau, enferme son mari dans un cachot dont elle seule garde toujours la clef ; le roi, plein de finesse, lui fait entendre que si elle cessait tout à coup de porter à manger à son mari, elle pourrait devenir veuve, et que lui, roi, pourrait l’épouser. Alors, tirant de son sac la clef du cachot conjugal, elle la laisse tomber tendrement dans le lac, en s’écriant : « Je suis reine ! » Ce mot touchant est le dernier de la pièce, que l’on a refusée, sans doute parce qu’elle a paru trop fade ; mais l’auteur d’Henri III, qui ne se décourage pas facilement, a porté ce chef-d’œuvre à l’Odéon, où il compte bien nous le voir applaudir cet hiver. » Il s’agit d’Edith aux longs cheveux. Tout le vicomte de Launay est déjà dans cette page de critique fine, pénétrante, spirituelle et ironique. Delphine connaît Alexandre Dumas depuis l’enterrement du général Foy, où, à côté d’elle, il a dit une