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gaux, les Ouvrard, les Hamelin, les Hainguerlot et autres, jusqu’aux hommes du Palais-Égalité, qui font le troc des montres, des bagues et des objets les plus hétéroclites, et que surveille la police[1]. Des fortunes immenses s’élèvent. On n’a plus besoin de se cotiser pour donner un bal. Les folies prennent un autre cours. La Chaussée d’Antin se peuple de millionnaires, et la somptuosité de l’hôtel de Mme  Récamier défraye la chronique. Mme  Tallien se montre un soir la gorge enserrée dans une rivière de diamants. Par son mari, Sophie Liottier appartient à ce monde de la finance, et la voilà au premier rang des Merveilleuses. Elle aussi court s’approvisionner de parfums dans cette rue Montorgueil, « où l’air est de roses et le vent une haleine de tubéreuse », au fameux magasin de Provence et d’Italie. Elle achète chez Erambert ses éponges de Venise et chez Garnier la célèbre eau de Pigeon qui rafraîchit le teint. Ses comptes de fournisseurs diraient sans doute combien elle avait de perruques, ces perruques poudrées de jaune, poudrées de bleu, qui un moment font fureur. En ce temps de guillotinades, les chevelures de femmes ne manquaient pas dans le commerce. Mme  Tallien en possède trente à vingt-cinq louis pièce, Mlle  Lange tout autant, et Mme  Hamelin dix de plus, chefs d’œuvre de Dumas, de Rey, de Duplan.

Sophie Liottier suit les concerts du théâtre Feydeau, ouverts en 1795, où Garat enthousiasme son public, et chante des romances cotées deux livres la syl-

  1. Arch. Préf. de Pol. : Rapports du commissaire détaché à la Bourse.