Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/74

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sit le roman, dont Aristote n’a pas parlé. Il développe si bien ses idées sur la manière d’écrire ce genre d’ouvrage, qu’il s’attire cette remarque : « Vous haïssez les règles, et vous en faites ». D’ailleurs, il demande au maître des conseils, qu’on lui donne, et qui sont toujours excellents, sur le style, sur la composition, sur la manière de nouer l’intrigue et de la dénouer, sur la progression à donner à l’intérêt, sur ce qu’il convient de demander aux livres ou de tirer de l’observation des passions humaines. « Dispensez-vous d’imaginer : il ne faut que regarder. » Le vieil homme de lettres précise ensuite quelques caractères, précisément ceux des héros du roman de Sophie Gay, et finit par énumérer tant de conditions indispensables à la bonté de l’ouvrage que le jeune auteur s’écrie : « Savez-vous bien, mon cher maître, que voilà trop de conditions que vous exigez pour un travail de haute fantaisie ; et où trouver un roman qui les rassemble ? » À quoi le maître répond froidement : « Chez Pougens, libraire, quai Voltaire : demandez Laure d’Estell, par Mme … »

Le trait final prouve que l’ingéniosité dans la publicité ne date pas d’aujourd’hui.

Ce bel article, le croirait-on, suscite une polémique. Dans son roman, Sophie Gay définit ainsi un personnage, qu’elle appelle Mme de Gercourt : « Tu la traites bien sévèrement. Quoi ! Tu prétends qu’elle met les vices en action et les vertus en préceptes ? Ah ! ma Juliette, tu n’as pas réfléchi sur toute l’étendue de cette méchanceté ! Sais-tu bien qu’une femme de ce caractère serait plus dange-