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Page:Malot - En famille, 1893.djvu/116

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EN FAMILLE.

la glaçait. Elle ne devait pas hésiter plus longtemps ; tout de suite elle se mit sur ses jambes et se secoua fortement comme un cheval qui s’ébroue : en marchant, elle se réchaufferait.

Cependant, après réflexion, elle ne voulut pas encore partir, car il ne faisait pas assez clair pour qu’elle se rendît compte de l’état du ciel, et avant de quitter cette cabane, il était prudent de voir si la pluie n’allait pas reprendre.

Pour passer le temps, et plus encore pour se donner du mouvement, elle remit en place les fagots qu’elle avait dérangés la veille, puis elle peigna ses cheveux, et fit sa toilette au bord d’un fossé plein d’eau.

Quand elle eut fini, le soleil levant avait remplacé l’aube, et maintenant, à travers les branches des arbres, le ciel se montrait d’un bleu pâle, sans le plus léger nuage : certainement la matinée serait belle, et probablement la journée aussi ; il fallait partir.

Malgré les reprises qu’elle avait faites à ses bas, la mise en marche fut cruelle, tant ses pieds étaient endoloris, mais elle ne tarda pas à s’aguerrir, et bientôt elle fila d’un bon pas régulier sur la route dont la pluie avait amolli la dureté ; le soleil qui la frappait dans le dos, de ses rayons obliques, la réchauffait, en même temps qu’il projetait sur le gravier une ombre allongée marchant à côté d’elle ; et cette ombre, quand elle la regardait, la rassurait : car si elle ne donnait pas l’image d’une jeune fille bien habillée, au moins ne donnait-elle plus celle de la pauvre diablesse de la veille, aux cheveux embroussaillés et au visage terreux ; les chiens ne la poursuivraient peut-être plus de leurs aboiements, ni les gens de leurs regards défiants.