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Page:Malot - En famille, 1893.djvu/206

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EN FAMILLE.

— Bon ; viens avec moi. »

Il la conduisit devant un wagonet garé dans un coin, et lui répéta les explications de Rosalie, s’arrêtant à chaque mot pour crier :

« Comprends-tu ? »

À quoi elle répondait d’un signe de tête affirmatif.

Et de fait son travail était si simple qu’il eût fallu qu’elle fût stupide pour ne pas pouvoir s’en acquitter ; et, comme elle y apportait toute son attention, tout son bon vouloir, le père la Quille, jusqu’à la sortie, ne cria pas plus d’une douzaine de fois après elle, et encore plutôt pour l’avertir que pour la gronder :

« Ne t’amuse pas en chemin. »

S’amuser, elle n’y pensait pas, mais au moins, tout en poussant son wagonet d’un bon pas régulier, sans s’arrêter, pouvait-elle regarder ce qui se passait dans les différents quartiers qu’elle traversait, et voir ce qui lui avait échappé pendant qu’elle écoutait les explications de Rosalie ? Un coup d’épaule pour mettre son chariot en marche, un coup de reins pour le retenir lorsque se présentait un encombrement, et c’était tout ; ses yeux, comme ses idées, avaient pleine liberté de courir comme elle voulait.

À la sortie, tandis que chacun se hâtait pour rentrer chez soi, elle alla chez le boulanger et se fit couper une demi-livre de pain qu’elle mangea en flânant par les rues, et en humant la bonne odeur de soupe qui sortait des portes ouvertes devant lesquelles elle passait, lentement quand c’était une soupe qu’elle aimait, plus vite quand c’en était une qui la laissait indifférente. Pour sa faim, une demi-livre