À chaque instant Rosalie poussait des exclamations de joie comme si elle entendait une histoire tout à fait extraordinaire :
« Ce que vous devez vous amuser ! s’écria-t-elle quand Perrine expliqua comment elle avait fait sa première soupe à l’oseille.
— Quand ça réussit, oui ; mais quand ça ne marche pas ! J’ai travaillé trois jours pour ma cuiller ; je ne pouvais pas arriver à creuser la palette : j’ai gâché deux morceaux de fer-blanc ; il ne m’en restait plus qu’un seul ; pensez à ce que je me suis donné de coups de caillou sur les doigts.
— Je pense à votre soupe.
— C’est vrai qu’elle était bonne…
— Je vous crois.
— Pour moi qui n’en mange jamais, et ne mange non plus rien de chaud.
— Moi j’en mange tous les jours, mais ce n’est pas la même chose : est-ce drôle qu’il y ait de l’oseille dans les prairies, et des carottes, et des salsifis !
— Et aussi du cresson, de la ciboulette, des mâches, des panais, des navets, des raiponces, des bettes et bien d’autres plantes bonnes à manger.
— Il faut savoir.
— Mon père m’avait appris à les connaître. »
Rosalie garda le silence un moment d’un air réfléchi ; à la fin elle se décida :
« Voulez-vous que j’aille vous voir ?
— Avec plaisir si vous me promettez de ne dire à personne où je demeure.