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Page:Malot - En famille, 1893.djvu/391

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EN FAMILLE.

bien me sonner : un coup pour Bastien, deux coups pour moi. »

Mais ce dont « mademoiselle avait besoin », c’était d’être seule, autant pour passer la visite de sa chambre que pour se ressaisir, ayant été jetée hors d’elle-même par tout ce qui lui était arrivé depuis le matin.

Que d’événements, que de surprises en quelques heures, et qui lui eût dit le matin, quand sous les menaces de Théodore et de Talouel, elle se voyait en si grand danger, que le vent, au contraire, allait si favorablement tourner pour elle ? N’y avait-il pas de quoi rire de penser que c’était leur hostilité même qui faisait sa fortune ?

Mais combien plus encore eût-elle ri si elle avait pu voir la tête du directeur en recevant M. Vulfran au bas de l’escalier des bureaux.

« Je suppose que cette jeune personne a fait quelque sottise ? dit Talouel.

— Mais non.

— Pourtant, vous vous faites ramener par Félix ?

— C’est qu’en passant je l’ai déposée au château, afin qu’elle ait le temps de se préparer pour le dîner.

— Dîner ! Je suppose… »

Il était tellement suffoqué qu’il ne trouva pas tout de suite ce qu’il devait supposer.

« Je suppose moi, dit M. Vulfran, que vous ne savez que supposer.

— … Je suppose que vous la faites dîner avec vous.

— Parfaitement. Depuis longtemps je voulais avoir près de moi quelqu’un d’intelligent, de discret, de fidèle en qui je