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SANS FAMILLE

C’était donc un homme, puisqu’on lui parlait ?

Mais pour toute réponse je n’entendis qu’un rire sec semblable au cri d’un oiseau.

C’était donc un animal ?

Cependant mon maître continua ses questions, ce qui me parut tout à fait déraisonnable, car chacun sait que si les animaux comprennent quelquefois ce que nous leur disons, ils ne peuvent pas nous répondre.

Quel ne fut pas mon étonnement lorsque cet animal dit qu’il n’y avait pas de maisons aux environs, mais seulement une bergerie, où il nous proposa de nous conduire.

Puisqu’il parlait, comment avait-il des pattes ?

Si j’avais osé je me serais approché de lui, pour voir comment étaient faites ces pattes, mais bien qu’il ne parût pas méchant, je n’eus pas ce courage, et ayant ramassé mon sac, je suivis mon maître sans rien dire.

— Vois-tu maintenant ce qui t’a fait si grande peur ? me demanda-t-il en marchant.

— Oui, mais je ne sais pas ce que c’est ; il y a donc des géants dans ce pays-ci ?

— Oui, quand ils sont montés sur des échasses.

Et il m’expliqua comment les Landais, pour traverser leurs terres sablonneuses ou marécageuses et ne pas enfoncer dedans jusqu’aux hanches, se servaient de deux longs bâtons garnis d’un étrier, auxquels ils attachaient leurs pieds.

— Et voilà comment ils deviennent des géants avec des bottes de sept lieues pour les enfants peureux.