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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 1.djvu/163

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SANS FAMILLE

sitôt autour de moi et Joli-Cœur prit place sur mon genou.

— Vos chiens mangent-ils du pain ? me demanda Arthur.

S’ils mangeaient du pain ! Je leur en donnai à chacun un morceau qu’ils dévorèrent.

— Et le singe ? dit Arthur.

Mais il n’y avait pas besoin de s’occuper de Joli-Cœur, car tandis que je servais les chiens, il s’était emparé d’un morceau de croûte de pâté avec lequel il était en train de s’étouffer sous la table.

À mon tour, je pris une tranche de pain, et si je ne m’étouffai pas comme Joli-Cœur, je dévorai au moins aussi gloutonnement que lui.

— Pauvre enfant ! disait la dame en emplissant mon verre.

Quant à Arthur, il ne disait rien, mais il nous regardait les yeux écarquillés, émerveillé assurément de notre appétit, car nous étions aussi voraces les uns que les autres, même Zerbino, qui cependant aurait dû se rassasier jusqu’à un certain point avec la viande qu’il avait volée.

— Et où auriez-vous dîné ce soir si nous ne nous étions pas rencontrés ? demanda Arthur.

— Je crois bien que nous n’aurions pas dîné.

— Et demain où dînerez-vous ?

— Peut-être demain aurons-nous la chance de faire une bonne rencontre comme aujourd’hui.

Sans continuer de s’entretenir avec moi Arthur se tourna vers sa mère, et une longue conversation s’engagea entre eux dans la langue étrangère que j’avais