Jamais Étiennette ne se couchait sans qu’il fût rentré, même quand il rentrait tard, très-tard.
Alors quand j’étais éveillé, ou quand le bruit qu’il faisait me réveillait, j’entendais de ma chambre leur conversation.
— Pourquoi n’es-tu pas couchée ? disait le père.
— Parce que j’ai voulu voir si tu n’avais besoin de rien.
— Ainsi mademoiselle Gendarme me surveille !
— Si je ne veillais pas, à qui parlerais-tu ?
— Tu veux voir si je marche droit ; eh bien ! regarde, je parie que je vais à la porte des enfants sans quitter ce rang de pavés.
Un bruit de pas inégaux retentissait dans la cuisine, puis il se faisait un silence.
— Lise va bien ? disait-il.
— Oui, elle dort ; si tu voulais ne pas faire de bruit.
— Je ne fais pas de bruit, je marche droit, il faut bien que je marche droit puisque les filles accusent leur père. Qu’est-ce qu’elle a dit en ne me voyant pas rentrer pour souper ?
— Rien ; elle a regardé ta place.
— Ah ! elle a regardé ma place.
— Oui.
— Plusieurs fois ? Est-ce qu’elle a regardé plusieurs fois ?
— Souvent.
— Et qu’est-ce qu’elle disait ?
— Ses yeux disaient que tu n’étais pas là.
— Alors elle te demandait pourquoi je n’étais pas là, et tu lui disais que j’étais avec les amis.