Aller au contenu

Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/110

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
102
SANS FAMILLE

aise dans l’eau que sur la terre ferme ; mais comment se diriger dans ce trou sombre ?

Je n’avais pas pensé à cela quand je m’étais laissé glisser, je n’avais pensé qu’au magister qui allait se noyer, et avec l’instinct du terre-neuve je m’étais jeté à l’eau.

Où chercher ? De quel côté étendre le bras ? Comment plonger ?

C’était ce que je me demandais quand je me sentis saisir à l’épaule par une main crispée et je fus entraîné sous l’eau. Un bon coup de pied me fit remonter à la surface : la main ne m’avait pas lâché.

— Tenez-moi bien, magister, et appuyez en levant la tête, vous êtes sauvé.

Sauvés ! nous ne l’étions ni l’un ni l’autre, car je ne savais de quel côté nager : une idée me vint.

— Parlez donc, vous autres, m’écriai-je.

— Où es-tu, Rémi ?

C’était la voix de l’oncle Gaspard ; elle m’indiqua ma direction. Il fallait se diriger sur la gauche.

— Allumez une lampe.

Presque aussitôt une flamme parut ; je n’avais que le bras à allonger pour toucher le bord, je me cramponnai d’une main à un morceau de charbon, et j’attirai le magister.

Pour lui il était grand temps, car il avait bu et la suffocation commençait déjà : je lui maintins la tête hors de l’eau et il revint bien vite à lui.

L’oncle Gaspard et Carrory, penchés en avant, tendaient vers nous leurs bras, tandis que Pagès, descendu de son palier sur le nôtre, nous éclairait. Le