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SANS FAMILLE

j’ai dit en le voyant disparaître qu’il ne nous mangerait plus une partie de notre air respirable ; et cette parole, je me la reprocherai toute ma vie.

— Allons donc, dit l’oncle Gaspard, il n’avait pas volé son sort.

— Maintenant, tout va bien marcher, dit Pagès en frappant avec ses deux pieds contre la paroi de la remontée.

Si tout ne marcha pas bien et vite comme l’espérait Pagès, ce ne fut pas la faute des ingénieurs et des ouvriers qui travaillaient à notre sauvetage.

La descente qu’on avait commencé à creuser avait été continuée sans une minute de repos. Mais le travail était difficile.

Le charbon à travers lequel on se frayait un passage était ce que les mineurs appellent nerveux, c’est-à-dire très-dur, et comme un seul piqueur pouvait travailler à cause de l’étroitesse de la galerie, on était obligé de relayer souvent ceux qui prenaient ce poste, tant ils mettaient d’ardeur à la besogne les uns et les autres.

En même temps l’aérage de cette galerie se faisait mal : on avait, à mesure qu’on avançait, placé des tuyaux en fer-blanc dont les joints étaient lutés avec de la terre glaise, mais bien qu’un puissant ventilateur à bras envoyât de l’air dans ces tuyaux, les lampes ne brûlaient que devant l’orifice du tuyau.

Tout cela retardait le percement, et le septième jour depuis notre engloutissement on n’était encore arrivé qu’à une profondeur de vingt mètres. Dans les conditions ordinaires, cette percée eût demandé plus d’un