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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/143

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SANS FAMILLE

une minute, et l’eau baissait, toujours régulièrement.

— Annonce que l’eau baisse, dit le magister.

— Nous le savons ; soit par la descente, soit par la galerie ; on va venir à vous… bientôt.

Les coups de pic devinrent moins forts. Évidemment on s’attendait d’un moment à l’autre à faire une percée, et comme nous avions expliqué notre position, on craignait de causer un éboulement qui, nous tombant sur la tête, pourrait nous blesser, nous tuer, ou nous précipiter dans l’eau, pêle-mêle avec les déblais.

Le magister nous explique qu’il y a aussi à craindre l’expansion de l’air, qui, aussitôt qu’un trou sera percé, va se précipiter comme un boulet de canon et tout renverser. Il faut donc nous tenir sur nos gardes et veiller sur nous comme les piqueurs veillent sur eux.

L’ébranlement causé au massif par les coups de pic détachait dans le haut de la remontée des petits morceaux de charbon qui roulaient sur la pente et allaient tomber dans l’eau.

Chose bizarre, plus le moment de notre délivrance approchait, plus nous étions faibles : pour moi je ne pouvais pas me soutenir, et couché dans mon charbon menu, il m’était impossible de me soulever sur le bras ; je tremblais et cependant je n’avais plus froid.

Enfin, quelques morceaux plus gros se détachèrent et roulèrent entre nous : l’ouverture était faite au haut de la remontée : nous fûmes aveuglés par la clarté des lampes.

Mais instantanément, nous retombâmes dans l’obscurité ; le courant d’air, un courant d’air terrible, une trombe entraînant avec elle des morceaux de charbon