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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/18

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SANS FAMILLE

monterais moi-même. Voilà qui serait intéressant : je verrais ce qu’il y avait dedans et ce qui la faisait marcher. Elle n’avait qu’à se bien tenir : je la conduirais sévèrement.

Je m’étais si bien laissé emporter par la joie que je ne m’apercevais pas que Capi était presque aussi joyeux que moi ; il me tirait par la jambe de mon pantalon et il jappait de temps en temps. Enfin ses jappements, de plus en plus forts, m’arrachèrent à mon rêve.

— Que veux-tu, Capi ?

Il me regarda, et, comme j’étais trop troublé pour le comprendre, après quelques secondes d’attente, il se dressa contre moi et posa sa patte contre ma poche, celle où était ma montre.

Il voulait savoir l’heure « pour la dire à l’honorable société », comme au temps où il travaillait avec Vitalis.

Je la lui montrai ; il la regarda assez longtemps, comme s’il cherchait à se rappeler, puis, se mettant à frétiller de la queue, il aboya douze fois ; il n’avait pas oublié. Ah ! comme nous allions gagner de l’argent avec notre montre ! C’était un tour de plus sur lequel je n’avais pas compté.

Comme tout cela se passait dans la rue vis-à-vis la porte de la prison, il y avait des gens qui nous regardaient curieusement et même qui s’arrêtaient.

Si j’avais osé j’aurais donné une représentation tout de suite, mais la peur des sergents de ville m’en empêcha.

D’ailleurs il était midi, c’était le moment de me mettre en route.