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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/189

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SANS FAMILLE

— Non, monsieur le juge de paix.

— Allons, raconte-moi comment est arrivée la catastrophe de Varses ; j’en ai lu le récit dans les journaux, si tu n’es pas vraiment Rémi, tu ne me tromperas pas ; je t’écoute, fais donc attention.

Le tutoiement du juge de paix m’avait donné du courage : je voyais bien qu’il ne nous était pas hostile.

Quand j’eus achevé mon récit, le juge de paix me regarda longuement avec des yeux doux et attendris. Je m’imaginais qu’il allait me dire qu’il nous rendait la liberté, mais il n’en fut rien : sans m’adresser la parole, il me laissa seul. Sans doute il allait interroger Mattia pour voir si nos deux récits s’accorderaient.

Je restai assez longtemps livré à mes réflexions, mais à la fin le juge de paix revint avec Mattia.

— Je vais faire prendre des renseignements à Ussel, dit-il, et si comme je l’espère ils confirment vos récits, demain on vous mettra en liberté.

— Et notre vache ? demanda Mattia.

— On vous la rendra.

— Ce n’est pas cela que je voulais dire, répliqua Mattia, qui va lui donner à manger, qui va la traire ?

— Sois tranquille, gamin.

Mattia aussi était rassuré.

— Si on trait notre vache, dit-il en souriant, est-ce qu’on ne pourrait pas nous donner le lait ? cela serait bien bon pour notre souper.

Aussitôt que le juge de paix fut parti, j’annonçai à Mattia les deux grandes nouvelles qui m’avaient fait