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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/188

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SANS FAMILLE

Cependant au milieu de mon embarras j’éprouvais une vive satisfaction : puisque le juge de paix connaissait mère Barberin et qu’il s’informerait auprès d’elle de la vérité ou de la fausseté de mon récit, cela prouvait que mère Barberin était toujours vivante.

J’en éprouvai bientôt une plus grande encore ; au milieu de ces questions le juge de paix me dit que Barberin était retourné à Paris depuis quelque temps.

Cela me rendit si joyeux que je trouvai des paroles persuasives pour le convaincre que la déposition du vétérinaire devait suffire pour prouver que nous n’avions pas volé notre vache.

— Et où avez-vous eu l’argent nécessaire pour acheter cette vache ?

C’était là la question qui avait si fort effrayé Mattia quand il avait prévu qu’elle nous serait adressée.

— Nous l’avons gagné.

— Où ? Comment ?

J’expliquai comment, depuis Paris jusqu’à Varses et depuis Varses jusqu’au Mont-Dore, nous l’avions gagné et amassé sou à sou.

— Et qu’alliez-vous faire à Varses ?

Cette question m’obligea à un nouveau récit ; quand le juge de paix entendit que j’avais été enseveli dans la mine de la Truyère, il m’arrêta et d’une voix toute adoucie, presque amicale :

— Lequel de vous deux est Rémi ? dit-il.

— Moi, monsieur le juge de paix.

— Qui le prouve ? Tu n’as pas de papiers, m’a dit le gendarme.