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SANS FAMILLE

Où allons-nous ? Je commence à être inquiet, et de temps en temps Mattia me regarde ; cependant il ne m’interroge pas.

De la rue nous sommes passés dans une ruelle, puis dans une cour, puis dans une ruelle encore ; les maisons sont plus misérables que dans le plus misérable village de France ; beaucoup sont en planches comme des hangars ou des étables, et cependant ce sont bien des maisons ; des femmes tête nue, et des enfants grouillent sur les seuils.

Quand une faible lueur nous permet de voir un peu distinctement autour de nous, je remarque que ces femmes sont pâles, leurs cheveux d’un blond de lin pendent sur leurs épaules ; les enfants sont presque nus et les quelques vêtements qu’ils ont sur le dos sont en guenilles : dans une ruelle, nous trouvons des porcs qui farfouillent dans le ruisseau stagnant, d’où se dégage une odeur fétide.

Notre guide ne tarde pas à s’arrêter ; assurément il est perdu ; mais à ce moment vient à nous un homme vêtu d’une longue redingote bleue et coiffé d’un chapeau garni de cuir verni ; autour de son poignet, est passé un galon noir et blanc ; un étui est suspendu à sa ceinture ; c’est un homme de police, un policeman.

Une conversation s’engage, et bientôt nous nous remettons en route, précédés du policeman ; nous traversons des ruelles, des cours, des rues tortueuses ; il me semble que çà et là des maisons sont effondrées.

Enfin nous nous arrêtons dans une cour dont le milieu est occupé par une petite mare.

Red lion court, dit le policeman.