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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/373

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SANS FAMILLE

entra dans mon cachot et me dit de le suivre : je vis avec satisfaction que c’était un homme d’environ cinquante ans qui ne paraissait pas très-souple.

Les choses purent s’arranger selon les prescriptions de Mattia, et, quand le train se mit en marche, j’étais placé près de la portière par laquelle j’étais monté ; j’allais à reculons ; le policeman était en face de moi ; nous étions seuls dans notre compartiment.

— Vous parlez anglais ? me dit-il.

— Un peu.

— Vous le comprenez ?

— À peu près, quand on ne parle pas trop vite.

— Eh bien, mon garçon, je veux vous donner un bon conseil : ne faites pas le malin avec la justice, avouez : vous vous concilierez la bienveillance de tout le monde ; rien n’est plus désagréable que d’avoir affaire à des gens qui nient contre l’évidence ; tandis qu’avec ceux qui avouent on a toutes sortes de complaisances, de bontés ; ainsi moi, vous me diriez comment les choses se sont passées, je vous donnerais bien une couronne : vous verriez comme l’argent adoucirait votre situation en prison.

Je fus sur le point de répondre que je n’avais rien à avouer, mais je compris que le mieux pour moi était de me concilier la bienveillance de ce policeman, selon son expression, et je ne répondis rien.

— Vous réfléchirez, me dit-il, en continuant, et quand en prison vous aurez reconnu la bonté de mon conseil, vous me ferez appeler, parce que, voyez-vous, il ne faut pas avouer au premier venu, il faut choisir celui qui s’intéressera à vous, et moi, vous