Aller au contenu

Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/410

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
402
SANS FAMILLE

que j’avais vue autrefois sur le Cygne qui vint à sa place ; elle nous dit que madame Milligan nous attendait chez elle, et qu’une voiture était à la porte de l’hôtel pour nous conduire : c’était une calèche découverte dans laquelle Mattia s’installa sans surprise et très-noblement, comme si depuis son enfance il avait roulé carrosse ; Capi aussi grimpa sans gêne sur un des coussins.

Le trajet fut court ; il me parut très-court, car je marchais dans un rêve, la tête remplie d’idées folles ou tout au moins que je croyais folles : on nous fit entrer dans un salon, où se trouvaient madame Milligan, Arthur étendu sur un divan, et Lise.

Arthur me tendit les deux bras ; je courus à lui pour l’embrasser ; j’embrassai aussi Lise, mais ce fut madame Milligan qui m’embrassa.

— Enfin, me dit-elle, l’heure est venue où vous pouvez reprendre la place qui vous appartient.

Et comme je la regardais pour lui demander l’explication de ces paroles, elle alla ouvrir une porte, et je vis entrer mère Barberin, portant dans ses bras des vêtements d’enfant, une pelisse en cachemire blanc, un bonnet de dentelle, des chaussons de tricot.

Elle n’eut que le temps de poser ces objets sur une table, avant que je la prisse dans mes bras ; pendant que je l’embrassais, madame Milligan donna un ordre à un domestique, et je n’entendis que le nom de M. James Milligan, ce qui me fit pâlir.

— Vous n’avez rien à craindre, me dit-elle doucement, au contraire, venez ici près de moi et mettez votre main dans la mienne.