À ce moment la porte du salon s’ouvrit devant M. James Milligan, souriant et montrant ses dents pointues ; il m’aperçut et instantanément ce sourire fut remplacé par une grimace effrayante.
Madame Milligan ne lui laissa pas le temps de parler :
— Je vous ai fait appeler, dit-elle d’une voix lente, qui tremblait légèrement, pour vous présenter mon fils aîné que j’ai eu enfin le bonheur de retrouver, — elle me serra la main ; — le voici ; mais vous le connaissez déjà, puisque chez l’homme qui l’avait volé, vous avez été le voir pour vous informer de sa santé.
— Que signifie ? dit M. James Milligan, la figure décomposée.
– … Cet homme, aujourd’hui en prison pour un vol commis dans une église, a fait des aveux complets ; voici une lettre qui le constate ; il a dit comment il avait volé cet enfant, comment il l’avait abandonné à Paris, avenue de Breteuil ; enfin comment il avait pris ses précautions en coupant les marques du linge de l’enfant pour qu’on ne le découvrît pas ; voici encore ces linges qui ont été gardés par l’excellente femme qui a généreusement élevé mon fils ; voulez-vous voir cette lettre ; voulez-vous voir ces linges ?
M. James Milligan resta un moment immobile, se demandant bien certainement s’il n’allait pas nous étrangler tous ; puis il se dirigea vers la porte ; mais prêt à sortir, il se retourna :
— Nous verrons, dit-il, ce que les tribunaux penseront de cette supposition d’enfant.