Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/123

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– Et il est très occupé, M. Espinassous ? dis-je.

– Oh ! oui ! je le crois bien qu’il est occupé ; comment ne le serait-il pas ?

– Croyez-vous qu’il voudra nous recevoir demain matin ?

– Bien sûr ; il reçoit tout le monde, quand on a de l’argent dans la poche, s’entend.

Comme c’était ainsi que nous l’entendions nous aussi, nous fûmes rassurés, et avant de nous endormir nous discutâmes longuement, malgré la fatigue, toutes les questions que nous poserions le lendemain à cet illustre professeur.

– Après avoir fait une toilette soignée, c’est-à-dire une toilette de propreté, la seule que nous pussions nous permettre puisque nous n’avions pas d’autres vêtements que ceux que nous portions sur notre dos, nous prîmes nos instruments, Mattia son violon, moi ma harpe, et nous nous mîmes en route pour nous rendre chez M. Espinassous.

Capi avait, comme de coutume, voulu venir avec nous, mais nous l’avions attaché dans l’écurie de l’aubergiste, ne croyant pas qu’il était convenable de se présenter avec un chien chez le célèbre musicien de Mende.

Quand nous fûmes arrivés devant la maison qui nous avait été indiquée comme étant celle du professeur, nous crûmes que nous nous étions trompés, car à la devanture de cette maison se balançaient deux petits plats à barbe en cuivre, ce qui n’a jamais été l’enseigne d’un maître de musique.