Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/168

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Le mobilier se composait d’un banc pour s’asseoir, et d’un hamac pour se coucher.

Je me laissai tomber sur ce banc et j’y restai longtemps accablé, réfléchissant à ma triste condition, sans suite, car il m’était impossible de joindre deux idées et de passer de l’une à l’autre.

En voyant le geôlier entrer dans ma prison, j’avais éprouvé un mouvement de satisfaction et comme un élan d’espérance, car depuis que j’étais enfermé j’étais tourmenté, enfiévré par une question que je me posais sans lui trouver une réponse.

– Quand le magistrat m’interrogerait-il ? Quand pourrais-je me défendre ?

J’avais entendu raconter des histoires de prisonniers qu’on tenait enfermés pendant des mois sans les faire passer en jugement ou sans les interroger, ce qui pour moi était tout un, et j’ignorais qu’en Angleterre il ne s’écoulait jamais plus d’un jour ou deux entre l’arrestation et la comparution publique devant un magistrat.

Cette question que je ne pouvais résoudre fut donc la première que j’adressai au geôlier qui n’avait point l’air d’un méchant homme, et il voulut bien me répondre que je comparaîtrais certainement à l’audience du lendemain.

Mais ma question lui avait suggéré l’idée de me questionner à son tour ; puisqu’il m’avait répondu, n’était-il pas juste que je lui répondisse aussi ?

– Comment donc êtes-vous entré dans l’église ? me demanda-t-il.