Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/187

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– Tout cela est d’une gravité extrême pour vous, pour nous tous ; nous ne devons donc agir qu’avec prudence et après avoir consulté des personnes capables de nous guider ; mais jusqu’à ce moment vous devez vous considérer comme le camarade, comme l’ami, – elle hésita un peu, – comme le frère d’Arthur, et vous devez, dès aujourd’hui, abandonner, vous et votre jeune ami, votre misérable existence ; dans deux heures vous vous présenterez donc à Territet, à l’hôtel des Alpes, où je vais envoyer une personne sûre vous retenir votre logement ; ce sera là que nous nous reverrons, car je suis obligée de vous quitter.

De nouveau elle m’embrassa et après avoir donné la main à Mattia, elle s’éloigna rapidement.

– Qu’as-tu donc raconté à madame Milligan ? demandai-je à Mattia.

– Tout ce qu’elle vient de te dire et encore beaucoup d’autres choses, ah ! la bonne dame ! la belle dame !

– Et Arthur, l’as-tu vu ?

– De loin seulement, mais assez pour trouver qu’il a l’air d’un bon garçon.

Je continuai d’interroger Mattia ; il évita de me répondre, ou il ne le fit que d’une façon détournée ; alors nous parlâmes de choses indifférentes jusqu’au moment où, selon la recommandation de madame Milligan, nous nous présentâmes à l’hôtel des Alpes. Quoique nous eussions notre misérable costume de musiciens des rues, nous fûmes reçus par un domes-