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Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/35

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de votre département va vous payer des mois de nourrice ?

– Dame, puisqu’il n’a pas de parents et qu’il est à ma charge, il faut bien que quelqu’un paye pour lui ; c’est juste, il me semble.

– Je ne dis pas non, mais croyez-vous que tout ce qui est juste se fait ?

– Pour ça non.

– Eh bien, je crois bien que vous n’obtiendrez jamais la pension que vous demandez.

– Alors, il ira à l’hospice ; il n’y a pas de loi qui l’oblige à rester quand même dans ma maison si je n’en veux pas.

– Vous avez consenti autrefois à le recevoir, c’était prendre l’engagement de le garder.

– Eh bien, je ne le garderai pas ; et, quand je devrais le mettre dans la rue, je m’en débarrasserai.

– Il y aurait peut-être un moyen de vous en débarrasser tout de suite, dit le vieillard, après un moment de réflexion, et même de gagner à cela quelque chose.

– Si vous me donnez ce moyen-là, je vous paye une bouteille, et de bon cœur encore.

– Commandez la bouteille, et votre affaire est faite.

– Sûrement ?

– Sûrement.

– Ce que vous voulez, n’est-ce pas, dit-il, c’est que cet enfant ne mange pas plus longtemps votre pain ; ou bien s’il continue à le manger, c’est qu’on vous le paye ?