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Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/77

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– Et où auriez-vous dîné ce soir si nous ne nous étions pas rencontrés ? demanda Arthur.

– Je crois bien que nous n’aurions pas dîné.

– Et demain où dînerez-vous ?

– Peut-être demain aurons-nous la chance de faire une bonne rencontre comme aujourd’hui.

Sans continuer de s’entretenir avec moi, Arthur se tourna vers sa mère, et une longue conversation s’engagea entre eux dans la langue étrangère que j’avais déjà entendue ; il paraissait demander une chose qu’elle n’était pas disposée à accorder ou tout au moins contre laquelle elle soulevait des objections.

Tout à coup il tourna de nouveau sa tête vers moi, car son corps ne bougeait pas.

– Voulez-vous rester avec nous ? dit-il.

Je le regardai sans répondre, tant cette question me prit à l’improviste.

– Mon fils vous demande si vous voulez rester avec nous.

– Sur ce bateau !

– Oui, sur ce bateau : mon fils est malade, les médecins ont ordonné de le tenir attaché sur une planche ainsi que vous voyez. Pour qu’il ne s’ennuie pas, je le promène dans ce bateau. Vous demeurerez avec nous. Vos chiens et votre singe donneront des représentations pour Arthur qui sera leur public. Et vous, si vous le voulez bien, mon enfant, vous nous jouerez de la harpe. Ainsi vous nous rendrez service, et nous de notre côté, nous vous serons peut-être utiles. Vous n’aurez point chaque jour à trouver un