Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/81

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Je le regardai, et je trouvai qu’il avait bien vieilli en prison ; sa taille s’était voûtée ; son visage avait pâli, ses lèvres s’étaient décolorées.

– Eh bien ! tu me trouves changé, n’est-ce pas, mon garçon ? me dit-il ; la prison est un mauvais séjour, et l’ennui une mauvaise maladie ; mais cela va aller mieux maintenant.

Puis changeant de sujet :

– Et cette dame qui m’a écrit, dit-il, comment l’as-tu connue ?

Alors, je lui racontai comment j’avais rencontré le Cygne, et comment depuis ce moment j’avais vécu auprès de madame Milligan et de son fils ; ce que nous avions vu, ce que nous avions fait.

Mon récit fut d’autant plus long que j’avais peur d’arriver à la fin et d’aborder un sujet qui m’épouvantait ; car jamais maintenant je ne pourrais dire à mon maître que je désirais le quitter pour rester avec madame Milligan et Arthur.

Mais je n’eus pas cet aveu à lui faire, car nous arrivâmes à l’hôtel où madame Milligan était logée, avant que mon récit fût terminé. D’ailleurs Vitalis ne me dit rien de la lettre de madame Milligan et ne me parla pas des propositions qu’elle avait dû lui adresser dans cette lettre.

– Et cette dame m’attend ? dit-il, quand nous entrâmes à l’hôtel.

– Oui, je vais vous conduire à son appartement.

– C’est inutile, donne-moi le numéro et reste ici à m’attendre, avec les chiens et Joli-Cœur.