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un petit somme. » Michet prit les guides sans répliquer et tendit tout son intellect à faire marcher la diligence d’un bon pas, et sans accidents.

M. Pichon avait une singulière manière de dormir ; sa tête, par moments lui tombait sur la poitrine, et il émettait de temps à autre des ronflements sonores. Malgré cela, il entr’ouvrait à chaque instant l’œil que Michet ne pouvait pas voir, et il surveillait attentivement les descentes, les passages difficiles, les saignées de la route et les rencontres de voitures. Il se réveillait juste à chaque relai et indiquait à Michet l’endroit où il devait s’arrêter.

Arrivé à Châteauroux, M. Pichon invita Michet à sa propre table, et lui retint une chambre voisine de la sienne.

« Je compte sur toi pour me réveiller demain matin à quatre heures, parce que je me sens tout « chose » et que je ne suis pas sûr de me réveiller tout seul. Voilà ma montre, elle est remontée, ne la pose pas sur le marbre. À quatre heures, heure militaire ! »

À quatre heures, heure militaire, Michet frappa à la porte de M. Pichon. M. Pichon avait passé une mauvaise nuit ; il allait se dorloter un peu pendant que Michet s’occuperait des préparatifs du départ.

Michet fut très troublé à l’idée de commander, et il craignit qu’on ne refusût de lui obéir.

« Ne t’inquiète de rien, lui répondit M. Pichon en affectant un air languissant, tu n’as qu’à leur dire: « J’ai ordre de fil. Pichon ! »

À peine Michet fut-il sorti que M. Pichon se leva prestement, et procéda à sa toilette avec l’entrain d’un homme qui aurait passé une excellente nuit.

Tout en faisant sa toilette, il regardait ce qui se passait dans la cour de l’hôtel. Michel sautillait à droite et à gauche avec une grande agilité.

« On ne croirait vraiment pas qu’il est boiteux, » se dit M. Pichon, en hochant la tête d’un air de profonde satisfaction.

Comme la diligence était attelée et les bagages chargés, et que