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EXTRAITS DES ENTRETIENS D’ÉPICTÈTE.

la retraite, comme à Socrate, il faut obéir à son signal, comme à celui d’un général.

Moi, je crois que, parmi ceux qui sont assis ici, il y en a qui couvent quelque chose en eux-mêmes, et qui disent : « Ne se présentera-t-il pas pour moi une épreuve pareille à celle qui s’est présentée pour lui ? Dois-je passer ma vie assis dans un coin, tandis que je pourrais être couronné à Olympie ? Quand m’annoncera-t-on pour moi une pareille lutte ? » Voilà comme vous devriez être tous.

Parmi les gladiateurs de César il y en a qui s’indignent de ce que personne ne les emmène pour les mettre en face d’un adversaire, qui font pour cela des prières aux dieux, et qui vont trouver leur surveillants pour leur demander de combattre. Ne verra-t-on donc parmi vous personne de cette trempe ? Moi je voudrais traverser la mer à cette seule fin de voir ce que ferait mon lutteur, et comment il se tirerait de la question qui lui serait posée par les choses[1]. — « Je ne veux pas de celle-là, » dit-il. — Est-ce qu’il est en ton pouvoir d’avoir la question que tu veux ?

XXV

Des rôles que nous jouons dans la comédie humaine[2].

Un temps viendra bientôt où les acteurs croiront que leurs masques, leurs brodequins et leurs robes sont eux-mêmes ! Homme, ce sont là tes instruments et les éléments de ton rôle. Parle un peu, afin que nous sachions si tu es un véritable acteur ou si tu n’es qu’un farceur : car tout le reste leur est commun. Otez donc à un individu ses sandales et son masque, et amenez-le sur la scène sous sa forme propre, en sera-ce fait de l’acteur, ou subsistera-t-il encore ? Il subsistera, s’il sait parler.

De même ici : « Accepte ce commandement. » — Je l’accepte ; et, après l’avoir accepté, je montre comment s’y

  1. Sur ces questions que nous posent les choses, voir Extrait XL et l’Introduction.
  2. V. le Manuel, xvii.