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Page:Manuel d’Épictète, trad. Guyau, 1875.djvu/96

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manuel d’épictète

XVIII

les présages.


Quand le corbeau jette un croassement de mauvais augure, que l’imagination ne t’emporte point ; mais aussitôt, fais en toi-même une distinction et dis : rien ne me regarde dans ces présages, mais ils regardent ou mon chétif corps, ou mon petit bien, ou ma petite réputation, ou mes enfants, ou ma femme[1]. Pour moi, tous présages sont heureux, si je le veux : car, quoi qu’il en arrive, il dépend de moi d’en tirer du bien.


XIX

comment on peut être invincible.
placer le bien en nous seuls, est le moyen de supprimer en nous l’envie.


I. Tu peux être invincible, si tu ne descends au combat que lorsqu’il est en ton pouvoir de vaincre.

II. Prends garde qu’en voyant quelqu’un honoré, ou élevé à une grande puissance, ou florissant de quelque autre manière, tu ne le juges heureux, emporté par ton imagination[2]. Si en effet l’essence du bien réside dans ce qui dépend de nous, ni l’envie ni la jalousie n’auront plus de lieu[3]. Et toi-même

  1. C’est se désintéresser par trop de ce qui regarde les autres. Ceux que j’aime ne doivent-ils pas être pour moi comme d’autres moi-même ?
  2. Tacite (Annales, vi) : Neque mala vel bona, quæ vulgus putet. Multos qui conflictari adversis videantur, beatos ; ac plerosque, quanquam magnas per opes, miserrimos : si illi gravem fortunam constanter tolerent ; hi prospera inconsulte utantur.
  3. L’envie et la jalousie viennent en nous d’une impuissance,