Page:Marais - La Maison Pascal.djvu/163

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La voix sèche de M. Pascal traduisait sa rancune soudaine à l’égard du jeune sot inoffensif qui lui avait valu cette fausse alerte.

Sans remarquer la roideur de Lucien, Camille s’accouda à son fauteuil, resta un moment silencieux, avec ces regards fixes, concentrés sur un point invisible, de l’homme qui rassemble ses phrases ; — puis, commença :

— Mon Dieu, Monsieur, c’est plutôt malaisé à dire… Je vous demanderai d’avoir l’obligeance de m’écouter patiemment et de me saisir à demi-mot… Voici. Je me trouve dans une situation pénible — celle de tous les jeunes gens de mon âge : la plupart en souffrent autant que moi, mais n’osent le confesser de crainte de paraître trop naïfs, par pudeur de leurs sentiments… Nous sommes à la période où nos aspirations éthérées s’élèvent vers un idéal d’amour sublime, où nos exigences corporelles sont guidées par un esprit affamé de poésie… Et, sauf exception, de viles contingences nous astreignent à satisfaire cette fringale idyllique… dans une