Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/24

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— Pour vous… par égard à la situation de madame votre mère… J’accepterai une transaction. Versez dix mille francs d’acompte sur les trente mille francs dus, et je patienterai pour le reste.

— Mais, monsieur, dix mille francs sont aussi difficiles à trouver que trente mille !

— Décidément, vous ne savez pas vous y prendre…

Et l’homme d’affaires conclut cyniquement :

— Voyons, mademoiselle, quand on est jolie fille, on ne laisse pas sa mère dans l’embarras. Vous ne me ferez pas croire que vous n’avez pas, autour de vous, quelqu’un… un ami… un soupirant… qui serait ravi de devenir votre providence.

Laurence s’était levée, saisie de honte au point d’en perdre la parole.

Thoyer s’approcha d’elle et dit, avec une lueur équivoque dans le regard :

— Vous ne savez même pas demander… Si vous aviez voulu…

Son geste devenait enveloppant. Laurence crispa le poing, prête à frapper l’impudent.

Soudain, la porte du bureau qui donnait sur l’appartement particulier de Thoyer s’ouvrit brusquement et Mme Thoyer entra en coup de vent, criant à son mari :

— Dis donc, Henry, je sors… Tu me rejoindras à Armenonville, pour déjeuner.

Prête à la promenade, ondulée, fardée, parfumée, la femme de l’homme d’affaires portait une robe de gabardine beige exagérément courte, découvrant ses hautes bottes de cuir fauves, lacées sur le côté, et ses mollets en bas de soie jaune.

Elle murmura, étonnée, à la vue de Laurence :