Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/29

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rieux : tous les employés s’interrompirent. Ce fut le silence. Les coups redoublèrent.

— Qu’est-ce que c’est ? maugréa le tailleur. Allez ouvrir…

Une vendeuse s’empressa de tirer les verrous et de tourner le pêne. La porte s’écarta devant un gros homme en complet bleu de roi qui s’élança à l’intérieur de la boutique en balbutiant :

— Mademoiselle… Mademoiselle d’Hersac !

D’un bond, Laurence fut au milieu du magasin : elle avait reconnu le concierge de la rue Vaneau. On venait la chercher, de chez elle.

Elle eut un cri :

— Maman ?

Le concierge, embarrassé, regardait fixement M. Litynski, sans oser jeter les yeux sur Laurence. Il se décida à déclarer :

— Voilà… Madame la marquise ne va pas très fort… Alors, c’est Maria qui m’envoie quérir Mademoiselle.

Il se tut ; et, par contenance, s’hypnotisa dans la contemplation des pièces d’étoffe qui jonchaient le sol.

— Monsieur Litynski !

À la voix déchirante de Laurence, le tailleur eut un geste bienveillant pour lui prendre la main. Il connaissait l’histoire de son employée et s’intéressait à cette vaillante fille. Il la congédia doucement :

— Allez, allez vite, mon enfant…

Et, se tournant vers le concierge, il l’interrogea silencieusement. Les deux hommes échangèrent un regard apitoyé. Le concierge murmura entre ses dents :

— Fichue… crois bien.

Dehors, le concierge s’excusa en désignant une voiture arrêtée à la porte.

— J’ai pris un taxi et je l’ai gardé… J’ai