Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/70

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« J’ai bien envie de vomir. » Des nausées de plus en plus fréquentes l’incommodaient. Il souhaita naïvement : « Je serais heureux de descendre », désolé de s’être exposé à ce malaise désormais inéluctable. Pour se résigner, il ferma les yeux en voulant se donner l’illusion qu’il n’était pas en avion. Afin de s’encourager, il se répétait : « Tout a une fin. Ceci finira donc. » Il se laissa aller, ainsi qu’en rêve.

Un avion allemand leur fit la chasse ; son aile blanche fendait l’air, rapide comme un oiseau de proie. Il n’était pas dans les projets des deux jeunes gens de se détourner, de leur route : l’aviateur profita de l’excellence de son appareil pour s’élever à une hauteur prodigieuse, échappant au Fritz.

Teddy avait le sentiment de s’être enivré ; sa tête était lourde ; sa vue se brouillait ; il fixait machinalement l’armature de l’avion, la banquette de bois, sans pouvoir échapper à cette sensation fantastique de navigation aérienne, de plongée et de bondissement au milieu de l’éther. À présent, des hallucinations se mêlaient à son vertige. Il s’imaginait chevaucher quelque coursier fantôme à travers les nuages ; des étoiles rouges scintillaient devant ses yeux. Puis, il fut dans un ascenseur qui descendait trop vite, sombrant dans le vide : impression horrible.

Soudain, il reprit contact avec la réalité :