Page:Marais - Le Huitieme Peche.pdf/259

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raisonne à cet instant ainsi qu’un bourgeois cupide et mesquin : mes vues sont plus larges. L’homme est né pour s’accroître, car une juste ambition est la vertu des âmes nobles. Enfants, nous profitons du patrimoine paternel ; adultes, nous le faisons fructifier ; et, pères à notre tour, nous avons le devoir de transmettre à notre descendance une fortune supérieure à celle de l’aïeul, que nos fils s’obligent à augmenter, grâce à leurs efforts. Ainsi le flambeau doit s’alimenter d’un feu plus vigoureux au fur et à mesure qu’il passe entre les mains d’un nouveau coureur. Notre richesse n’est pas le bien d’un seul : c’est la propriété de la famille dont nous sommes les dépositaires. L’homme fortuné qui choisit une compagne indigente, ou la fille bien dotée qui accepte un mari sans argent, sont répréhensibles d’une action anti-sociale — car ils amoindrissent leur postérité afin de satisfaire leur désir égoïste. Médite mon exemple : j’ai attendu jusqu’à quarante-deux ans pour me marier, n’ayant pas rencontré plus tôt la femme appelée à élever ma situation. Je me suis refusé la joie de voir mes en-