Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/137

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j’ai le cœur sec. Jadis, mon âme était un arbre chargé de fleurs et de fruits : peu à peu, la vie a effeuillé les pétales, pourri la semence, secoué les branches à tous les vents ; et il n’est plus resté qu’un tronçon de bois dépouillé — mais se dressant fièrement sur ses racines solides — qui s’appelle : mon orgueil… c’est le seul point sensible où l’on puisse m’atteindre… J’en souffre terriblement, aujourd’hui. Ah ! Fargeau… Vous ne savez pas quelle maîtresse vous tiendrez contre vous, lorsque votre volonté aura triomphé des scrupules mesquins… Je m’imagine déjà mes caresses, à la pensée de l’acte accompli… Mon amour vaut bien une trahison.

Maxime faiblit, car il discuta :

— Cet acte, d’abord, serait impossible… Je connais madame Lorderie.

— Moi, je connais son mari.

— Denise Lorderie est une honnête femme : on n’a qu’à la considérer… elle est née petite bourgeoise.

— Le carnier de don Juan contient plus de lapins de choux que de poules faisanes… Cette