Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/23

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Fargeau dissimulait ses infidélités par un souci beaucoup plus tendre. Sensuel et séduisant, il obéissait à la destinée qui lui avait façonné une plastique incomparable, l’avait pétri d’une chair voluptueuse et l’exposait à la tentation des plus rares conquêtes. Mais, ce don Juan aimait son Elvire : uni à une délicate créature, frêle, sensible et dévouée, il l’avait toujours préservée des surprises douloureuses, des soupçons justifiés. Après cinq ans de ménage, Renée Fargeau — peu mondaine, vivant à l’écart — ignorait encore les prouesses galantes de son mari et la renommée qu’elles lui valaient dans tout Paris.

Fargeau s’effrayait parfois en songeant combien ces intrigues perpétuelles qui le blasaient sans l’assouvir, eussent fait souffrir Renée, au cas d’une découverte. Il réfléchissait : « Est-ce bête, pourtant, de risquer le bonheur d’une femme pour la nuit d’une fille ! » Et il continuait…

Il se comparait à ces joueurs enragés, qui hasardent chaque jour leur fortune afin de ponter sur un canasson infâme.