Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/114

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d’une gaieté forcée cachent d’humiliation cuisante, de douleur rentrée, de larmes fièrement réprimées… Pauvre petite Sylvie. Je pétris ses mains entre les miennes, d’une caresse affectueuse, tandis qu’elle soupire, regardant sa montre :

— Déjà cinq heures et demie ! Il faut que je rejoigne Fraülein au thé du boulevard Hausmann…

— Je vais vous faire reconduire ! L’auto vous y déposera en cinq minutes.

Je l’accompagne jusqu’au vestibule. Elle se retourne vers moi, avant de sortir. Je dis :

— Adieu, mademoiselle.

Les grandes prunelles bleues me fixent d’un regard un peu attristé. Je remarque :

— Vous avez l’air de regretter quelque chose, mademoiselle Sylvie ?

Elle fait, avec une grâce inexprimable, cette réponse imprévue :

— Oui… Je vous détestais, en entrant ici… Et pourtant, maintenant… maintenant… Ça m’ennuie que nous ne puissions pas être amies.

Et la bizarre jeune fille me quitte, souriant à demi d’un sourire furtif, hésitant et timide,