Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/174

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Je m’introduis délibérément dans l’antichambre, écartant le domestique du bout de mon gant. Effaré, il s’efforce de protester, une réelle inquiétude enrouant sa voix :

— Mais, monsieur ne reçoit pas, ce matin… Il m’a bien défendu de… Il est très occupé.

— Mon ami : fermez la bouche, et ouvrez la main.

Je glisse un louis dans la paume qu’il tendait pour me repousser. Au contact du métal, le valet de chambre s’amadoue ; sa face sourit, tordue d’un rictus servile. Il avoue, jouant l’affliction :

— Je veux bien annoncer madame : seulement, je crains que madame ne soit renvoyée…

— Ça, c’est mon affaire. Dites à monsieur Léon Brochard que je tiens à le voir absolument, au sujet d’une question de toute importance… Je ne partirai pas, si je n’ai pu lui parler.

Ma décision impressionne le domestique. Il me fait passer au salon sans oser de nouvelles objections ; il a constaté en moi les deux qualités des supérieurs : je sais commander et je sais payer.

Néanmoins, je l’entends grogner à voix basse, avec un haussement d’épaules significatif :