Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/67

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sottises — depuis les bêtises de mon enfance : fruits chipés, allumettes répandues, jusqu’aux fautes moins anodines — soulève par saccades légères le tulle de mon corsage. Je savoure ma peur comme un bonbon acidulé.

Léon Brochard habite au second. À mon coup de timbre, un valet de chambre glabre et sévère ouvre la porte, sur un vestibule spacieux, orné de plantes vertes et de meubles cannés. Le domestique m’examine, l’œil soupçonneux, et questionne d’un air gourmé :

— Madame est attendue ?

— Parfaitement, passez ma carte.

Nouvelle stupeur du larbin qui la déchiffre d’un regard oblique… Sur le mince carré de bristol, il y a : nicole, simplement, — gravé en égyptienne de fantaisie : alors que tant de femmes prennent un nom de guerre, moi, je me suis contentée de supprimer le nom de famille.

Le valet de chambre se résout enfin à m’introduire dans un salon d’attente où six messieurs grisonnants et décorés patientent déjà, avec les attitudes diverses de la résignation. À mon entrée, ils secouent leur torpeur pour me considérer sans bienveillance, leurs visages