Page:Marais - Pour la bagatelle.djvu/136

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timide pensionnaire qui entrevoyait sa vie future à travers les romans des éditions Hachette, où les amours sont toujours d’une pureté céleste, où le héros est invariablement un jeune homme vertueux ?… Si bien que la lectrice ingénue, au sortir de cet azur, reste persuadée que le monde est une bergerie peuplée d’agneaux inoffensifs ; — et, sur ce, court se jeter dans la gueule du loup.

— Dieu ! que ces livres à couverture rose sont pernicieux pour les jeunes personnes ! soupirait Mme de Francilly.

Elle ajoutait :

— Pourquoi leur dissimuler les écueils de la vie réelle ? À quoi bon leur interdire certains romans ? C’est en lisant Clarisse Harlowe qu’on apprend à se défier de Lovelace. Si j’avais mis les œuvres de Maupassant entre les mains de Simone, elle n’eût pas épousé Bel-Ami.

La comtesse était trop spirituelle pour n’être pas paradoxale. Elle acquit cette con-