Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/106

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— Si, je sais.

Et Marcel soupira pour lui-même : « Cette fraîcheur, cet enthousiasme, ces sensations neuves de fillettes sevrées de plaisir… Ils ne seront pas à plaindre, les maris de mes petites Tardivet ! Je commence à trouver que je leur fais la meilleure part ; qui sera Gros-Jean de l’aventure : les dupés — ou leur trompeur ? »

Sous l’influence de ces réflexions, Marcel, dans l’obscure baignoire où il se rencognait, assis derrière Gilberte et coude à coude avec Jack Pick, rêvait au moyen de préciser ses incertitudes. Il regardait les trois nuques blanches des trois jeunes filles appuyées au bord de la loge, immobiles et attentives. L’écrivain pensait : « En somme, c’est moi qui les tiens là, haletantes et crispées d’émotion ; c’est moi qui les fais rire et frissonner de plaisir ; c’est moi qu’elles applaudissent… » Les répliques des acteurs, en scène, lui arrivaient comme des crépitements de bataille : ces phrases, ces cris, ces exclamations, c’étaient l’œuvre de Marcel d’Arlaud, l’artillerie victorieuse qui enlevait le succès…

Enhardi, il se pencha, tâtonnant dans la nuit