Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/165

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condition de votre bonheur. Avouez que vous êtes venue me trouver de votre plein gré : je n’étais pas allé vous chercher. Je me suis intéressé à votre avenir avec un dévouement de tuteur ; pourtant, qu’étiez-vous pour moi : une étrangère, une inconnue… Et vous pensez que vous serez quitte envers votre serviteur avec un gentil merci donné verbalement ? Nous sommes loin de compte, ma chère. Me prenez-vous pour un niais, — ou pour un dyspepsique : j’aurais préparé le festin de Lucullus sans avoir envie d’en goûter les hors-d’œuvre ? Mon estomac a plus d’exigence. Vous allez crier que je me comporte comme un mufle ; mais un homme est toujours mufle en amour… et je vous aime. Oh ! Pas à la façon de Pick ou de Salmon : eux sont bien pris, cœur et chair. Chez moi, le cœur est resté froid : ma lucidité l’a calmé ainsi qu’une douche glaciale. Je vous aime, mais je vous juge. Vous avez une âme trop malléable pour être digne d’une passion platonique : peut-on chérir profondément le doux miroir inconscient qui reflète la pensée de chaque passant ? Aussi, ne craignez point mon importunité : je